Nous disons dans la Hagada de Pessah que même si nous sommes tous des érudits, nous avons une obligation de raconter le récit de la sortie d’Égypte. Dans le Talmud, les sages rajoutent : même si nous sommes seuls à fêter ce soir-là, nous avons le devoir de nous raconter à nous-mêmes le récit.
Nous pouvons nous demander, à juste titre, quelle est l’utilité d’une telle chose. Ce que nous connaissons ne va pas produire plus d’effet sur nous, si nous nous le contons !
La réalité est différente, le commandement qui nous est donné, ce soir-là, est d’intégrer ce qui s’est passé, lors de la sortie d’Égypte, pas seulement de savoir. Or, l’intégration d’une idée se fait au niveau du LEV, c’est-à-dire du cœur. Même si l’esprit est intelligent, en d’autres termes, qu’il est capable de comprendre des notions compliquées, le cœur quant à lui est comparé à un ignorant, il ne connaît pas les notions.
Le concernant, il est plus juste de dire qu’il ne les vit pas. Éduquer son cœur est quelque chose de très compliqué. Nous pouvons appréhender ce qui s’est passé lors de la sortie d’Égypte, mais l’intégrer, le ressentir, au point d’exprimer dans nos actions la vérité de la toute-puissance de Dieu, et de manifester une reconnaissance sans limites, peut s’avérer beaucoup plus difficile.
En psychanalyse, le cœur est assimilé à l’inconscient, et l’esprit au conscient. L’inconscient, c’est-à-dire le LEV, est, ce qui fait agir l’Homme.
Si nous voulons changer quelque chose en nous, c’est au niveau de notre cœur que cette métamorphose doit s’opérer.
Le Rav Eliahou Dessler[i] nous donne la solution pour modifier son LEV dans le quatrième tome du Mi’htav Méliahou. Il dit je cite: le moyen de se transformer, c’est de se construire des images vivantes sur les sujets qui concernent la sainteté. Il faut se sentir vivre cette richesse spirituelle. Le Rav Sim’ha zissel Zal[ii] disait même, que si nos patriarches ont atteint un niveau si élevé, c’est parce qu’ils utilisaient la force extraordinaire qu’est la visualisation.
Le Yetsser Arah, c’est-à-dire le mauvais penchant, connaît bien ce mécanisme. Toute sa stratégie repose dessus. Il va créer en nous des images de nos envies. Par des pensées récurrentes, il nous fait vivre des situations, au point de nous les faire ressentir très profondément. La faute devient alors inévitable. C’est d’ailleurs ce que disent les maximes des pères : « l’Homme au moment de la faute est habité par un esprit de folie ».
Ce que nous avons à faire, c’est de se servir de ce procédé dans le bien. Il faut créer des images de ce que nous voulons atteindre. En cultivant ces images, en les vivant véritablement, nous créons en nous une force qui nous attire vers le but que nous nous sommes fixé.
Il faut vivre comme si le but était déjà atteint. Il est important également, de ressentir une profonde joie d’avoir atteint ce but. Tous ces sentiments vont faire de notre but qu’il devienne une réalité. Si notre intellect comprend les raisonnements, notre cœur lui a besoin de sentiments. C’est ce que nous devons susciter, si nous voulons changer en profondeur.
Le Rav Dessler dit que les justes formaient en eux des
images du Gan Éden, et cultivaient le sentiment de joie de se trouver dans le chemin tracé par Dieu. Grâce à cela, ils
réussirent à vaincre leur mauvais penchant.
C’est d’ailleurs pour cela que le Talmud est rempli d’histoires vivantes qui nous permettent, si l’on conserve leurs images en nous, de modifier notre LEV.
Par exemple, le traité de Roch Hachana commence par l’enseignement suivant : le jour de Roch Hachana tous les Hommes passent devant Dieu comme le ferait un troupeau traversant un enclos, c’est-à-dire l’un après l’autre. Il s’agit ici, d’une image vivante de notre situation en ce jour de jugement. Se voir passer seul devant Dieu, sans aucune assistance, derrière qui nous pourrions nous cacher.
[i] RAV ELIAHOU DESSLER : Rabbi Eliahou Eliezer Dessler est né en 5651 (1891), de Rabbi Réouven Dov, grand tsaddik et disciple principal de Rabbi Sim’ha Zissel de Kelm. Rabbi Réouven Dov était un homme riche, qui donnait beaucoup d’argent pour la tsedakah et la Torah. Pendant une longue période, il fut le soutien essentiel du célèbre Talmud Torah de Kelm.
Eu égard à ses dons exceptionnels, son père l’envoya à un âge tendre étudier au Talmud Torah de Kelm, Le jeune Eliahou Eliezer était le plus jeune de sa promotion. Il y resta pendant dix-huit ans, et acquit une renommée d’excellence parmi les meilleurs élèves. Il était extrêmement assidu dans l’étude, s’asseyait dans un coin où il étudiait la Torah avec une concentration extraordinaire, et il était totalement impossible de le distraire.
En 5679 (1919), il épousa la fille de Rabbi Na’houm Zéev, le fils de Rabbi Sim’ha Zissel. En 5687 (1927), il partit pour l’Angleterre et accepta d’être Rav de la synagogue de l’Est londonien. Il avait également sous son contrôle un Talmud Torah où étudiaient quatre cents élèves. Une nouvelle période commença dans sa vie avec la fondation du « Kollel Avrekhim » pour des Benei Torah adultes dans la ville de Gateshead, au nord de l’Angleterre. Il se consacra avec tout son enthousiasme à éduquer des avrekhim dans le véritable esprit du moussar qu’il avait reçu de ses grands maîtres. Il passait le plus clair de son temps avec eux et leur communiquait des idées élevées sur le moussar et la Torah. En même temps, il aida à fonder d’autres institutions, comme le « Beith Midrach LaMorot » (pour les jeunes filles) et une mekhina (préparation) à la yéchivah.
En 5708 (1948) se produisit un nouveau tournant dans sa vie. Le gaon Rabbi Yossef Kahneman, le Rav de Poniewitz, à Bnei Brak, lui proposa de venir être machguia’h de la célèbre yéchivah. Il accepta de venir à Poniewitz, mais à la condition qu’il pourrait aussi continuer son travail en Angleterre, et ainsi il partageait son temps entre les deux pays.Il enseigna la Torah en Erets-Israël pendant six ans, travaillant avec des forces surhumaines, jusqu’à tomber malade. Il eut une crise cardiaque, et le 25 Tevet 5714 (1954), il rendit son âme à son Créateur.
[ii] RAV SIM’HA ZISSEL : Il naquit en 1824 EN Kelm, il était un descendant du ’Ha’ham Tzvi. Il est connu comme étant le principal élève du Rav Israël Salanter zal. Il créa une Yéchivah à Kelm visant principalement l’étude du Moussar(la morale), dans le but de forger la personnalité des élèves.
L’ article vous a plût ? Je vous rappelle que vous pouvez vous procurez le livre qui complétera votre recherche en l’achetant au meilleur prix sur Amazon via ce lien
N'hésitez pas à commenter !